Il se pourrait bien d’ailleurs que la somme des désagréments occasionnés par ces événements et les contraintes multiples qui y sont liées et qui vont être imposées aux habitants en viennent à mettre un terme aux olympiades organisées dans un environnement urbain, par essence compliqué à sécuriser. Malgré le souhait d’A Hidalgo, qui n’est pas à un oxymore politique près, de voir les Parisiens rester et faire la fête tout en leur conseillant le télétravail et en imposant des règles de circulation tout simplement décourageante, quand elles ne seront pas plus coûteuses à l’image du ticket de métro, l’olympisme fait plus soupirer que rêver et la retransmission télévisée apparait souvent comme une solution idéale.
Militaires et policiers français auxquels seront associés des policiers étrangers, vigiles et caméras à tous les coins de rue indéniablement, Paris va être une fête !
Les espoirs économiques qui sont habituellement associés à de tels événements, du fait d’une fréquentation touristique accrue ne seront pas nécessairement déçus, mais cela reste encore à prouver, car la dissémination des épreuves de Paris – et sa grande couronne – à Tahiti en passant par Bordeaux, Marseille, Lyon, Montpellier, Nice, Saint-Étienne transforme singulièrement la lecture parisienne de cette Olympiade et offre un casse-tête sécuritaire qui pourrait faire sienne la devise olympique, citius, altius, fortius. Le rajout récent (assez moche dans le séquençage des mots) de communiter (ensemble en latin) ne change pas la donne.
Cette dimension sécuritaire que vont revêtir les Jeux parisiens de 2024 sans être nouveaux, mais qui n’était pas envisageable, à ce degré, quand le dossier de candidature de Paris a été déposé et les Jeux obtenus n’amène pas de réflexions majeures quant à ce qui pourrait être mis en place. Les recettes sont connues, des laissez-passer, des contrôles, de l’IA, des personnels, de l’électronique, tout cela va être mis dans le shaker de la place Beauvau assaisonné d’une dose de méthode Coué et de doigts croisés. Mais au fond il ne peut en être autrement et, si on arrive à contenir les imprévus comme lors de la dernière finale de la ligue des champions au Stade de France, les choses devraient bien se passer. L’autre approche aurait été d’imposer le huis clos pour le déroulé des épreuves, mais la magie du sport aurait certainement moins opéré.
Cette dimension sécuritaire pose cependant question quant à la pérennité de tels événements condensant dans une utilité de temps, d’actions et de lieu tant d’épreuves et d’athlètes. Elle est un défi pour les forces de sécurité publique, mais elle l’est aussi pour les entreprises de la sécurité privée.
La sécurité est une affaire de spécialistes, mais elle est aussi de plus en plus spécialisée. Les policiers ou gendarmes sont formés à tel ou tel type d’interventions, les CRS font du maintien de l’ordre leur fer de lance et on rappellera que les dérapages sont des plus rares, on ne leur demande pas de traiter d’enquêtes criminelles ou de faire de la police de proximité. On peut s’interroger sur la nécessité pour les entreprises de sécurité privée de faire de même. Les formations aujourd’hui dispensées pour former des agents de sécurité privée sont assez généralistes, seule vraie exception les convoyeurs de fonds titulaires d’un permis de port d’arme. Pour le reste que le vigile assure une ronde dans un entrepôt ou contrôle vos bagages dans un aéroport les qualifications demandées – ou leur absence – vont être sensiblement les mêmes. Des événements comme les Jeux Olympiques ou équivalents ne peuvent être sécurisés que par le simple parti pris de la quantité en rameutant à cette occasion toutes les bonnes volontés disponibles qui seront formées en quelques jours et envoyées sur le terrain ensuite. Il faut un peu plus que cela pour analyser un environnement, détecter un comportement suspect, identifier un paquet abandonné, observer tout déséquilibre dans l’ordonnancement d’un rassemblement.
La sécurité est une affaire de professionnels que ceux-ci relèvent de la sphère de l’Etat ou du privé. Pour ce dernier secteur d’activités, il y a encore des progrès à réaliser. La maitrise des outils technologiques de surveillance existe et l’IA présente dans les dernières évolutions facilite encore ce travail, encore faut-il que les personnels soient correctement formés pour ne pas être de simples spectateurs des images de leurs écrans de contrôle, mais bien des acteurs à même de réagir. La compétence des personnels de terrain, aux points de contrôle et d’entrée d’un stade par exemple, a assurément progressé. Il est de plus en plus rare de pouvoir éviter le contrôle et les amoncellements d’objets considérés comme dangereux et confisqués témoignent d’une réelle activité au service de la sécurité de tous.
Maintenant cette évolution professionnelle est soumise au paradoxe des moyens qui y sont consacrés par ceux qui les souhaitent, les organisateurs attendent des prestataires qu’ils fassent leur la devise olympique en termes d’engagement, mais, dans le même temps, ne semblent pas toujours disposés à y consacrer les ressources nécessaires, comptant pour beaucoup sur la générosité de l’Etat qui fournira les forces nécessaires à la sécurisation de l’espace public.
C’est le paradoxe pour protéger l’or et l’argent, on ne propose que du bronze.