Une « erreur individuelle » plaident les autorités allemandes. La diffusion en Russie, vendredi 1er mars, d’une conversation confidentielle entre des officiers de l’armée allemande sur l’aide militaire à l’Ukraine n’en provoque pas moins un profond malaise outre-Rhin.
Des propos ultrasensibles qui n’auraient jamais dû fuiter
La chaîne d’État russe RT a été la première à diffuser ces échanges, affirmant qu’ils ont été enregistrés lors d’une visioconférence, lundi 19 février. Une chose est sûre : ces propos ultrasensibles, dont une partie porte sur une éventuelle livraison de missile de longue portée Taurus, de fabrication allemande, à l’Ukraine, n’auraient jamais dû fuiter. D’autant plus que l’ampleur de la fuite ne s’arrête pas là. Dans la suite de la vidéo, les hauts gradés allemands reviennent en détail sur les données chiffrées de la livraison et du soutien de la France et de la Grande-Bretagne à l’armée ukrainienne.
Pour Frans Imbert-Vier, directeur général d’Ubcom, une entreprise spécialisée dans la protection cyber des organisations,l’affaire révèle deux problèmes de fonds : « Le premier est l’absence de culture du secret des États membres de l’UE (…).Trop d’erreurs de comportements de haut responsable nuisent à la préservation du secret. Le second est que l’usage d’une solution de communication américaine entraîne systématiquement une faculté d’écoute par un tiers, à commencer par les Américains eux-mêmes. »
En cause, la plateforme WebEx… et le professionnalisme des participants
La plateforme publique de visio-conférence WebEx, utilisée pour cette conversation, est en effet montrée du doigt. Selon le magazine Der Spiegel, avec les codes d’accès, un espion russe aurait pu participer à cette réunion sans que personne ne s’en aperçoive. Une autre hypothèse affirme qu’une chambre d’un des officiers – qui se trouvait dans un hôtel à Singapour – a pu être équipée de micros. Certains évoquent par ailleurs la possibilité qu’une « taupe » soit cachée au sein des forces armées allemandes. Pour rappel, fin 2022, un agent du BND, les renseignements fédéraux allemands, avait été arrêté pour soupçon de hautes trahisons au profit du Kremlin.
Toujours est-il, affirme Imbert-Vier, que « le responsable dans cette affaire est encore une fois l’acteur politique ». Pour le patron d’Ubcom, si la formation reste le nerf de la guerre à tous les niveaux de l’administration, « il faut néanmoins réformer les codes des marchés publics et interdire l’usage des solutions gratuites et extra continentales pour tous les échanges sensibles qu’ils soient régaliens ou économiques ».