« Il n’existe aucune définition des missions des polices municipales », déplorent huit maires de petites villes dans d’une tribune parue dans le journal Le Monde.
Les signataires, parmi lesquels Christophe Bouillon, président de l’Association des petites villes de France (APVF), souligne qu’à la suite d’une série de textes de loi élargissant les compétences des polices municipales, « le législateur, ainsi que le pouvoir réglementaire, ont pris l’habitude de déléguer à la police municipale des missions jugées chronophages, auparavant assumées par la police nationale et la gendarmerie ». Cela conduit la police municipale à se voir dotée d’ « attributions qui brouillent la distinction entre l’action de l’État et celle des collectivités ».
Qui fait quoi ?
Cette tendance s’est intensifiée avec l’introduction de la notion de « continuum de sécurité » dans le rapport Fauvergue-Thourot de 2018, lequel a abouti à la loi Sécurité globale de 2021 visant à mieux coordonner le travail des forces de police et de gendarmerie, de la police municipale et du secteur de la sécurité privée. Cependant, la question de la répartition des tâches est restée en suspens. Le Beauvau de la sécurité de 2021, censé apporter des réponses concrètes à cette problématique cruciale, n’a pas réussi à le faire.
Selon les signataires de la tribune, c’est « parce qu’il avait un autre projet pour les polices municipales : celui de les associer aux missions de police judiciaire ou de police administrative de l’État, pour ne plus avoir à porter lui-même ces missions ». Ce projet a jusqu’à présent échoué, car le juge constitutionnel a censuré l’article 1er de la loi Sécurité globale qui prévoyait une expérimentation de cinq ans permettant aux agents de police municipale « d’exercer des attributions de police judiciaire en matière délictuelle ». Les Sages du Conseil constitutionnel ont estimé que la police judiciaire « doit être placée sous la direction et le contrôle de l’autorité judiciaire ». Or, les policiers municipaux agissent sous le contrôle du maire.
« La police municipale doit rester sous l’autorité du maire »
Pour autant, la judiciarisation du pouvoir des polices municipales est revenue au cœur des discussions lors de la première session du Beauvau des polices municipales, en avril dernier. Alors que la Conférence nationale des procureurs soutient fortement cette mesure, l’Association des maires de France (AMF) et l’ensemble des élus représentés s’y opposent. Les signataires de la tribune craignent ainsi que l’État ne réintroduise cette question pour placer les policiers municipaux « sous l’autorité du parquet, et non plus sous celle des maires ». Pour eux, c’est une ligne rouge clairement tracée : « La police municipale doit rester sous l’autorité du maire. Elle dispose d’une légitimité propre, fondée sur la proximité de son action au service de la sécurité, de la sûreté et de la tranquillité publique ». Les polices municipales ont davantage besoin « d’une feuille de route fédératrice, claire et précise permettant d’identifier les missions et d’uniformiser les pratiques, tout en laissant aux maires la liberté de définir l’orientation qu’ils souhaitent donner dans le cadre de la loi ».
Les conclusions du Beauvau des polices municipales, attendues pour l’automne, permettront-elles enfin de trancher cette question épineuse ? Les décisions du gouvernement seront scrutées de près par les élus locaux.