Les messageries sécurisées sont au cœur des préoccupations gouvernementales. Elles avaient déjà été mises en cause dans l’organisation des attentats de Paris en 2015. En 2017, Emmanuel Macron, alors candidat, exprimait sa volonté de contraindre ces plateformes à collaborer avec la justice pour lutter contre le terrorisme. L’an dernier, Gérald Darmanin reprenait ces arguments après l’attaque d’Arras, et c’est aujourd’hui Bruno Retailleau qui réclame à son tour la mise en place d’un accès dérobé.
Un amendement pour contraindre les plateformes
Un premier pas en ce sens a été franchi. Comme le rapporte RTL, les sénateurs ont voté un amendement au projet de loi contre le narcotrafic, imposant aux plateformes de messagerie chiffrée de permettre aux forces de l’ordre d’accéder aux contenus des messages privés dans le cadre d’une enquête judiciaire, sous peine de sanctions.
Depuis une décennie, criminels et terroristes exploitent ces messageries pour communiquer en toute discrétion, rendant leurs échanges quasiment indéchiffrables sans accès direct à leurs appareils. Pour contourner cette barrière, les autorités cherchent à forcer ces services à collaborer avec la justice. Ainsi, en cas de refus, des plateformes comme WhatsApp ou Signal risqueraient une amende pouvant atteindre 1,5 million d’euros ou 2 % de leur chiffre d’affaires annuel.
Les défis du chiffrement et les inquiétudes des experts
Cependant, la mise en application de ces mesures s’annonce complexe. Le chiffrement de bout en bout est une garantie essentielle de la confidentialité des communications, et plusieurs sénateurs s’en sont inquiétés. De plus, les experts alertent sur les risques d’une telle initiative : l’introduction de portes dérobées affaiblirait la sécurité des échanges, les rendant vulnérables à des acteurs malveillants.
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Si la loi venait à être adoptée – le texte doit encore être examiné par l’Assemblée nationale -, des services comme WhatsApp ou Signal pourraient choisir de se retirer du marché français plutôt que de compromettre leur technologie. L’an dernier déjà, Signal avait menacé de quitter l’Europe lors de l’examen d’un règlement européen visant à instaurer une mesure comparable pour lutter contre la pédocriminalité. De son côté, WhatsApp avait fermement refusé toute législation visant à affaiblir la protection de ses 2 milliards d’utilisateurs.